SAINT  SEIYA : ARES

 

CHAPITRE  3 : LA TERRE TREMBLA ...

 

 

 

Mû se tenait sur le seuil de la maison du Bélier.L'aube se levait sur le Sanctuaire.Devant lui s'étendaient à perte de vue des ruines antiques et des collines rocheuses et escarpées.Là, chaque jour, des chevaliers s'entraînaient, dans l'espoir de devenir assez forts pour changer l'histoire du Monde.C'était un véritable univers qui vivait replié sur lui-même, cachés du regard des hommes grâce aux illusions créees par la formidable puissance psychique du grand Pope ou d'Athéna.Un touriste pourrait passer cent fois devant le Sanctuaire sans le voir!

 

Mû n'avait pas dormi cette nuit.Il attendait Hadès, tout en espérant chaque jour qu'il ne viendrait pas, pour une raison ou une autre.Ce n'était pas de la lâcheté.Mû savait que le Sanctuaire allait mal, qu'il ne tiendrait probablement pas face aux forces de l'au-delà.

Il pensait surtout à Shiryu et à ses compagnons, qui ne pouvaient sortir du Japon.C'était à la fois juste et absurde.Ils étaient les meilleurs chevaliers de Bronze existants et surclassait même la plupart des chevaliers d'argent.Mais ils avaient tant souffert pour le Sanctuaire... Mû était cependant persuadé que les chevaliers deSaori auraient tout donné pour être à sa place, et ce malgré leurs armures endommagées.Il se demandait si ces armures étaient encore fonctionelles.Toute armure peut se régénérer, il est vrai, sauf les armures trop gravement atteintes.Mais il faut attendre un certain temps pour retrouver son armure intacte.Seul lui, Mû de Jamir, pouvait accélérer ce processus.

L'image des berserkers chassa celle des chevaliers de Bronze.Mû avait sondé ses différentes connaissances au Sanctuaire, à leur propos, et les réactions étaient différentes : Phaéton appréciait d'avoir des renforts ; Shina, chevalier d'argent de l'Ophiucus, s'en méfiait au plus haut point ; Marine, chevalier d'argent de l'aigle, tentait, comme d'habitude, de prendre les choses de la manière officielle, c'est à dire en considéran les berserkers comme des renforts, peut-être un peu encombrants (mais Mû savait qu'elle n'en pensait pas moins) ; Astérion, chevalier d'argent des Chiens de chasse, survivant de la bataille du Sanctuaire, avouait tout simplement qu'il n'en avait que faire ; quand à Spartan, chevalier d'argent du Triangle, il avait envoyé paître le chevalier du Bélier par un grognement significatif. Mû savait que cela cachait une sorte de trouble : les chevaliers éprouvaient une aversion instinctive pour les berserkers, dûe à leur éducation au Sanctuaire ou dans leurs divers lieux d'entraînement, mais ils ne pouvaient critiquer ouvertement ceux qu'Athéna avait choisi comme alliés.

Il  restait à Mû à interroger les trois jeunes chevaliers d'Acier, aux armures mécaniques, créees par Mitsumasa Kido, grand-père adoptif de la princesse Saori, et qui, fidèles à leur serment de protéger Athéna, avait décidé de séjourner au Sanctuaire, eux aussi.

En dehors de ces quelques personnes, Mû ne connaissait plus grand monde au Sanctuaire.La plus grande partie des chevaliers de Bronze ou d'Argent avait été sacrés récemment.En temps normal, il aurait pu demander son avis à Kiki, son disciple, mais Mû l'avait chargé de trouver la seule personne capable de ralentir l'éclipse d'Hadès, grâce à laquelle celui-ci peut, à son réveil, rayer toute vie sur Terre.La rumeur disait qu'une seule personne sur la planète possède ce pouvoir, et ils allaient en avoir besoin, car...

Un bruit assourdissant retentit dans tout le Sanctuaire.En un instant, la principale colline qui se trouvait devant Mû fut réduite en poussière.Un nuage de fumée masquait l'horizon.Quand il se dissipa, Mû, stupéfait, aperçu un point brillant au sommet d'une colline voisine.C'était un chevalier, revêtu de son armure.

 

Fazil aimait ce qu'il faisait.Il aimait le bruit des explosions et les nuages de poussière.Alors, pourquoi s'en priver? Surtout lorsque c'est justifié.

Il s'apprétait donc à pulvériser une deuxième colline quand il aperçut un groupe de soldats du Sanctuaire s'approcher de lui.Il n'allait pas interrompre son travail pour une bande de misérables armés de bâtons! D'un simple claquement de doigts, il fit s'entrouvrir le sol sur une dizaine de mètres entre lui et le plus proche des gardes.Les trois hommes s'arrêtèrent, pétrifiés.

_Vous désirez? Lança Fazil d'un ton sarcastique.

_Vous...Vous êtes bien le responsable du séisme de tout à l'heure? Demanda le garde le plus courageux.

_C'est moi, oui.Vous voulez peut-être que je cesse ce genre d'activité?

_Mais...Oui, oui, c'est ça, oui.

_Désolé, les gars, mais vous ne m'empêcherez pas de vous rendre service!

_Nous rendre service? S'écria le garde, plus sûr de lui.Mais vous vous rendez compte que vous avez enseveli des vestiges de la Grèce Antique?

_Ce que je fais est plus important que de vieilles ruines inutiles! Répliqua Fazil, menaçant.

_Ah oui ? Je serais ravi que vous nous expliquiez cela en détail!

Celui qui venait de parler se tenait derrière Fazil... Et il ne l'avait pas vu venir! Le berserk se retourna : celui qui l'avait interrompu était un chevalier d'or, le chevalier d'or du Bélier!

Mû dévisageait calmement le berserk.C'était la première fois qu'il en voyait un, et il n'y avait pas à se tromper : le personnage était revêtu d'une armure bleue de platine, un alliage très résistant, et cette armure était presque intégrale.Le plus étonnant chez celui-ci était certainement le casque, surmonté d'une paire de cornes recourbées et de longues oreilles, et les protections des pieds et des mains, semblables à des sabots.

Mais Mû était surtout ravi de voir que le berserk était beaucoup moins sûr de lui face à un chevalier d'or que face à quelques gardes.

_A qui ai-je l'honneur ? Demanda-t-il tranquillement.

Le berserk se ressaisit.

_Je suis Fazil de l'Houchkaparik, berserk de la branche Sud! Et vous, vous êtes le chevalier d'or du Bélier, n'est-ce pas ? Demanda-t-il, narquois.

_Je vois que vous êtes bien renseignés sur nous! Lâcha Mû d'un ton ferme (le visage du berserk se rembrunit).Vous seriez bien aimable de me préciser ce qu'est l'Houchkaparik et la branche Sud, ajouta-t-il.

_Vous n'êtes pas très doués en mythologie, finallement, vous autres, répliqua Fazil (mais son ironie avait fait place à un accent de colère et d'impatience).La branche Sud est l'une des quatre branches formant l'Etoile de la Guerre.L'Etoile de la Guerre est le symbole d'Arès.C'est également la forme de son temple...

_Et la disposition sous laquelle vous êtes enfermés dans l'Etna, il me semble, glissa Mû.

_Précisement, reprit Fazil d'un ton dur.Cette Etoile est formée de quatre branche : Nord, Sud, Est, Ouest.Chaque branche est composée de sept armures, appartenant toutes à une mythologie apropriée : Nordique, Africaine, Asiatique et Grecque.Les quatre guides d'Arès, qui sont ses généraux, symbolisent chacun la pointe d'une branche.Quand au centre de l'Etoile, il s'agit de l'armure d'Arès en personne.Moi-même, berserk de l'Houchkaparik, j'appartiens à la branche Sud.L'Houchkaparik est en effet une créature de la mythologie Arménienne, mi-âne, mi-taureau, chargée de veiller sur les ruines des lieux sacrés...Et d'éliminer les profanateurs!

_Fort bien.Maintenant que je possède ces précieux éclaircissements, je vais vous demander de bien vouloir faire taire votre pouvoir sismique.

 

Mû avait en effet compris que le berserk utilisait les ondes sismiques pour détruire les rochers...Et certainement pour éliminer ses adversaires.

_Et de quel droit me donnez-vous cet ordre ? Lança Fazil, furieux.

_Du droit le plus universellement reconnu, celui du plus fort, dit simplement Mû.

_J'atteint sans aucune peine mach cent-vingt, je vous aurais prévenu.

_Je peux atteindre la vitesse lumière.

_Et c'est pour cela que nous allons faire cesser tout de suite cette altercation ridicule!

 

Mû, Fazil et les gardes tressaillirent.D'un seul mouvement, ils levèrent la tête pour voir celui qui venait de les interrompre.Une ombre s'était en effet abattue sur le petit groupe.

Tout d'abord, Mû n'en crut pas ses yeux.Le berserk qui venait d'aparaître flottait dans l'air.Le chevalier du Bélier se rappella alors que les armures munies d'ailes pouvaient permettre à leur possesseur de voler s'ils apprenaient à les maîtriser.C'était apparemment le cas ici.L'armure du berserk était en effet pourvue d'ailes, semblables à celle des chauve-souris, qui se déployaient derrière lui.Cette armure était très différente de celle de l'Houchkaparik.Elle était d'un violet éclatant et semblait faite d'écailles.Mû remarqua également une longue queue de métal bardée de pointes qui sortaient du dos du berserk, et, sur le casque, encadré d'oreilles pareilles à celles des éléphants, deux longues défenses tranchantes, ainsi que de petites cornes recourbées.

_Je suis Gerrit de Béhémot, également berserk de la branche Sud, déclara le nouvel arrivant.

Puis, se tournant vers l'Houchkaparik :

_Maintenant que tu as épaté la galerie, Fazil, tu pourrais envisager de suivre les conseils du chevalier du Bélier.

Il n'y avait pas à se tromper.Cette fausse politesse cachait un ordre pur et simple.Et Gerrit était déterminé à sauver l'alliance avec le Sanctuaire.Fazil jeta un oeil sur le chevalier d'or, casqué, qui semblait tout aussi prêt à engager le combat...

_C'est bon, siffla-t-il (il sourit).Nous n'allons pas nous entretuer pour des choses aussi simples, n'est-ce pas ?

Alors que les deux berserkers s'éloignaient, Mû s'écria :

_Il n'y a pas que le principe qui me dictait de vous faire abandonner votre tâche, Fazil de l'Houchkaparik.D'ailleurs, que faisiez-vous exactement ?

Le berserk se retourna, l'air sérieux :

_J'aménageais tout simplement des lignes de vue...Pour que les spectres d'Hadès n'aient pas trop d'endroits où se cacher dans le Sanctuaire.

_Qui vous avait demandé cela ?

_Je l'ai fait de ma propre initiative, répondit vivement Fazil.

Mû n'en croyait pas un mot.Mais, curieusement, il n'arrivait pas à lire dans les pensées des deux berserkers.Une force extérieure, discrète mais terriblement puissante, l'en empêchait.Il reprit :

_Comme je vous le disais, le danger que vous faites courir à ces lieux me préoccupe.Nous sommes dans une zone très instable, où les séismes sont courants.Vous pouvez avoir crée des fissures souterraines qui vont nous jouer quelques mauvais tour.Habituellement, la puissance d'Athéna protège le Sanctuaire de tels dangers, mais...

_Je contrôle mon pouvoir, coupa Fazil.Et je n'ai crée aucune fissure souterraine.

_Espérons, murmura Mû.

Le berserk, ayant tourné les talons, s'éloigna en ricanant.

 

Le lendemain, en début de matinée, une nouvelle stupéfiante traversa le Sanctuaire.Astérion était mort!

C'était Shina qui avait retrouvé le corps du chevalier d'Argent des Chiens de chasse.Inquiète de ne pas le voir à son lieu d'entraînement habituel, elle avait suivi l'itinéraire qu'Astérion empruntait chaque jour pour s'y rendre.Elle l'avait trouvé sous un monceau de roches qui s'étaient, apparemment, écroulées.Seule sa main en dépassait.Les rochers étaient tellement nombreux, qu'il avait fallu le pouvoir télékinésique de Spartan pour tous les écarter.Mais Astérion était mortdepuis longtemps.Malgré son armure, ses os s'étaient brisés comme de la paille.

La plupart des chevaliers du Sanctuaire assimilèrent cette tragédie à l'arrivée des berserkers.A la surprise de tous, Arès fournit un suspect : le berserk de l'Houchkaparik, qui s'était dénoncé lui-même.Il acceptait d'être emprisonné le temps que les diverses recherches sur cet accident prouvent que celui-ci était dû à un éboulement provoqué par le pouvoir sismique du berserk.Dans tous les cas, la thèse de l'assassinat était écartée...

 

Aucun des chevaliers d'Or n'avait réussi à raisonner Aiolia, même en invoquant le sens du devoir et l'ordre d'Athéna de ne pas quitter l'allée des douze maisons dans l'attente des spectres d'Hadès.Autant dire tout de suite que les gardes que Saori avait placé devant le temple d'Arès ne réussirent pas non plus.Le chevalier d'or du Lion, après avoir appris la mort d'Astérion, s'était fermement mis en tête qu'il était impératif pour sa propre santé mentale de se défouler sur le dieu de la guerre.

Il ouvrit avec fracas les portes du temple.Celui-ci était plongé dans l'obscurité.Seul visible dans un cercle de lumière, Arès, revêtu de son armure, était assis sur son trône, un sourire arrogant au visage.

_On frappe avant d'entrer! Dit-il doucement.

_Moi, je crois que je vais frapper après! Répliqua Aiolia.

_Tiens donc! Y aurait-il de la colère sous ces bienveillantes paroles ?

Aiolia explosa :

_C'est votre faute si Astérion est mort! Nous avons perdu un de nos chevaliers! L'essai est terminé! Vous n'avez plus rien à faire ici, vous et vos fous furieux!

Arès s'était levé :

_Du calme, chevalier.Vos accusations sont graves.Je vous rappelle qu'Athéna a refusé la dissolution de l'alliance.Ce qui s'est passé n'est qu'un regrettable accident.Je vous ai même livré un suspect! Que voulez-vous de plus ?

Aiolia fit un pas, menaçant :

_Je veux votre départ! Lâcha-t-il, les dents serrées.

 

En un instant, une lueur aveuglante s'empara de la salle.Arès restait impassible.Lentement, Aiolia se retourna.Devant lui se dressait un berserk à l'allure noble, aux traits orientaux, portant une armure couleur de feu, hérissée de pointes, dont le casque faisait irrésistiblement penser à un Lion.Un serpent de métal, dont la tête arrivait aux genoux du berserk, semblait sortir, telle une queue, du dos de l'armure, et une longue cape blanche lui claquait sur les talons.Surtout, une cosmo-énergie formidable émanait du personnage.C'était lui qui produisait l'éblouissante lumière qui inondait le temple.

_Je suis Nam, de la Chimère, guide de la branche Occidentale, et je ne supporterais aucune insulte envers mon maître, chevalier du Lion!

 

Le nouveau venu avait parlé d'une voix posée, bien que ses intentions soient très claire.Mais Aiolia ne répondit pas.Il était en train de se rendre compte qu'il avait en face de lui l'un des quatre guides de l'Etoile de la Guerre.Cet homme était au moins aussi fort qu'un chevalier d'or! Et soudain, Aiolia comprit que le berserk ne venait pas d'arriver dans le temple : il était là depuis le début! Il avait simplement masqué sa cosmo-énergie.Les autres berserkers pouvaient tout aussi bien se tenir ici, dans l'obscurité! Alors, furieux mais impuissant, Aiolia sortit du temple d'Arès, sentant le regard ironique du maître des lieux le raccompagner jusqu'à la porte.

 

_Je vous avais bien dit que vous vous prépariez à une catastrophe, mais vous n'en avez pas tenu compte!

Mû se trouvait dans l'une des cellules du Sanctuaire, là où l'on avait enfermé le berserk de l'Houchkaparik, derrière une lourde grille et sous la garde de deux soldats, qui servaient plus à prévenir en cas d'évasion qu'à stopper les chevaliers enfermés qui tenteraient de s'évader.Le chevalier du Bélier n'avait pas fait comme Aiolia : il avait averti ses compagnons de son absence momentanée.Il se sentait obligé d'aller parler à Fazil, ne serait-ce que pour comprendre cette affaire.Celui-ci se tenait justement assis face à lui, et ne semblait pas perturbé le moins du monde :

_Rien ne prouve que tout cela soit ma faute, chevalier.Cet éboulement était peut-être naturel...

Un long silence s'établit.Mû se contenta de dire :

_Astérion ne se serait jamais fait avoir par un éboulement, naturel ou accidentel.

Fazil ne répondit rien.Mû ne pouvait toujours pas lire dans ses pensées.Il demanda à sortir.Alors qu'il s'éloignait, il entendit Fazil lui parler :

_Bientôt vont avoir lieu des évènements extraordinaires, Mû du Bélier.Réfléchissez bien : seuls les forts peuvent survivre!

Mû ne s'arrêta pas, mais son esprit s'agitait furieusement.

 

La nuit était tombée sur le Sanctuaire.Parmi les chevaliers, certains dormaient, d'autres veillaient, mais tous attendaient, au fond, le réveil du royaume des morts.Peut-être pas tous.

Dans son temple, Arès attendait lui aussi.L'un après l'autre, les quatre guides de l'Etoile de la Guerre s'assemblèrent autour de lui.

_Vous savez tous ce que vous avez à faire.Vous êtes prêts.C'était une affirmation.Personne ne répondit.

L'un après l'autre, comme ils étaient venus, trois des généraux sortirent du temple.Celui qui restait était petit, avec le teint mat et les yeux noirs comme les abysses.Son armure rouge brillait comme une torche dans la nuit.

_La grande nuit est arrivée, Sutarji.J'espère que tu n'es pas trop déçu, déclara Arès.Tu comprends bien pourquoi je garde ta branche pour plus tard.

Le guide de la branche Sud garda le silence.

 

 

A  SUIVRE ...